24/02/2014
Un subtil équilibre
Autant le dire tout de suite, le lieu est fabuleux, un savant mélange d’élégance surannée et de modernité où mobilier montagnard ancien, statues polychromes du 16ème siècle chinées par les décorateurs (Les Héritiers à Lyon), tableaux baroques, et magnifiques objets de décoration en provenance d’Indonésie, côtoient le confort moderne sans aucune fausse note. Un pari réussi de mélange de styles qui confère à ce luxueux chalet de 25 chambres et suites une atmosphère unique. Le tout complété par une cuisine parfaitement aboutie, promesse d’une expérience gastronomique inoubliable.
Propriété de la famille Laurent Boix Vives qui a présidé aux destinées de la société Rossignol de 1956 à 2005, le Strato a ouvert ses portes en 2009 et propose 25 chambres et suites au décor unique avec la lumière et l’espace pour fil conducteur. Les très belles images d’archive de la société Rossignol se retrouvent déclinées dans les éléments de décoration comme ces immenses plaques de verre lumineuses qui rythment les couloirs et les principaux lieux de l’hôtel. Ici, tout est mis en œuvre pour que le séjour reste inoubliable et unique, sans aucune ostentation ni démesure. Une symphonie hôtelière orchestrée de main de maître par la maîtresse de maison Patricia Calvé qui assure avec discrétion et un grand professionnalisme la direction de l’hôtel depuis son ouverture.
Notre force, c’est la lumière
La quiétude des environs confère aux lieux un charme particulier qui attire une clientèle internationale en quête d’authenticité et de repos. De par sa situation privilégiée, à la fois au pied des pistes et au cœur de Courchevel 1850, l’hôtel fait partie des quelques établissements qui ont su tirer profit de la vallée en offrant à ses hôtes de vastes espaces baignés de lumière avec de très belles hauteurs de plafond. Patricia Calvé aime également souligner que les hôtes apprécient surtout l’atmosphère chaleureuse et l’esprit familial à la fois chic et sport de l’hôtel. Les clients fortunés, habitués à voyager énormément recherchent avant tout une maison qui a une âme et une véritable identité et aiment à se sentir comme à la maison.
Au Strato, malgré les enjeux énormes que représente la gestion d’un tel établissement, tout semble fluide, le personnel, très professionnel, est proche des clients tout en restant à sa place. Les hôtes avouent volontiers se sentir en sécurité dans cet endroit unique de Courchevel 1850, pour preuve l’excellente fidélisation dont l’établissement peut se prévaloir.
Mais si tout semble parfait, l’exploitation de l’établissement et surtout sa rentabilité, sont une véritable gageure à divers titres, précise Patricia Calvé. En effet, si des maisons comme Le Strato souffrent moins de la crise qui affecte les séjours à la montagne que d’autres établissements, puisqu’elles accueillent une clientèle peu impactée par la récession actuelle, il n’en demeure pas moins que l’hôtellerie de montagne impose d’importantes contraintes.
La concurrence est rude avec 16 établissements 5* à Courchevel
L’hôtellerie de montagne doit avant tout faire face à une saisonnalité très marquée. Ainsi, bien que Courchevel résiste mieux que les autres stations à la désaffection des séjours aux sports d’hiver, la saison hivernale est très courte et ne s’étend que de mi-décembre à début avril. Les clients étrangers qui ont un fort pouvoir d’achat ne viennent en effet pas à la montagne en été, préférant la riviera méditerranéenne ou des destinations plus lointaines. "Nous devons avoir une politique de commercialisation active afin de bien cibler la clientèle et remplir l’hôtel tout au long de la saison. Nous avons ainsi pu étendre un peu la saison en amont en accueillant les vacanciers kazakhs au mois de décembre". "Afin de compléter notre politique de commercialisation, nous avons entièrement refait notre site internet cette année. C’est en effet l’un des canaux de vente les plus importants, les visuels doivent être extrêmement parlants car il ne faut pas oublier que le sujet principal de notre communication est la vue ! Nous devons à tout prix cultiver notre différence et promouvoir l’espace et la lumière".
Par ailleurs, le segment affaire est très peu représenté au Strato, qui n’accueille que quelques séminaires incentive durant la saison, ce qui réduit d’autant plus la cible de clientèle de l’hôtel.
La saisonnalité très marquée pose également un problème pour le recrutement du personnel
La saisonnalité très marquée pose également un problème pour le recrutement du personnel avec une présence requise de moins de six mois. Compte tenu de ce facteur et de l’accessibilité du site, le personnel doit être logé sur place, ce qui implique une logistique importante et un coût non négligeable.
Une équation hôtelière difficile à équilibrer et qui ne peut être tenue que grâce à des offres de services complémentaires de très bonne qualité.
Le Strato l’a compris en offrant tout d’abord à ses hôtes une proposition gastronomique de haut vol assurée par Jean-André Charial qui préside depuis de nombreuses années déjà aux destinées de sa maison, l’Oustau de Baumanière en Provence.
J’aime la cuisine simple qui respecte les goûts des produits, j’aime aller à l’essentiel, ce qui n’empêche pas une certaine modernité
Contrairement aux autres chefs étoilés de Courchevel, Jean-André Charial n’agit pas en simple consultant du restaurant mais dirige la société qui gère tout le secteur F&B de l’hôtel. Une implication très importante pour ce Chef qui partage donc son temps entre Courchevel et Baumanière l’hiver, brillamment secondé par un artiste de talent, Sylvestre Wahid, qui a également pris les commandes de la cuisine de l’Oustau de Baumanière en 2006. Avec pour la note sucrée un atout de taille, Jonathan le frère de Sylvestre quoi fait équipe avec lui depuis le début de l’aventure provençale. "Cela présente quelques avantages car 80% du personnel de la cuisine vient de Baumanière, nous n’avons donc pas besoin de 15 jours pour nous mettre en place !" ironise Jean-André Charial. La difficulté réside plutôt en salle car le personnel est plus âgé avec des enfants et ne souhaite pas quitter Baumanière pour quelques mois.
Cette mécanique bien rôdée a valu au restaurant de l’hôtel de décrocher sa première étoile dès 2010, suivie d’une seconde deux ans plus tard. Une récompense largement méritée au regard de la cuisine proposée.
Jean-André Charial est un homme heureux et cela se ressent dans sa cuisine. Il possède en effet un don précieux, l’art de sublimer des produits du terroir de qualité, sans ajouter de décorations ostentatoires ni de saveurs inappropriées. Chaque assiette est une véritable leçon de vie basée sur un pari osé, mêler intelligemment innovation et authenticité. Chaque ingrédient est parfaitement dosé et tous se complètent avec bonheur pour former une belle harmonie en bouche avec des saveurs intactes. Mais c’est dans le mélange ingénieux des textures et des matières que l’on retrouve la signature des chefs. Ainsi, les dés croquants de céleri viennent-ils contraster avec la mousse de blanc d’œuf et son jaune coulant, le tout surmonté d’une tuile craquante.
Et c’est avec enthousiasme que Jean-André Charial nous livre sa recette du bonheur pour conclure l’entretien : "Faire ce que l’on a envie de faire et surtout pouvoir vivre sa passion".
Afin de répondre à toutes les attentes de la clientèle et de compléter son offre, l’hôtel propose également un élégant spa opéré par Nuxe dont les luxueuses infrastructures comme la vaste piscine ouverte sur la montagne sont à la hauteur des lieux. Le tout complété par une large carte de soins. Un véritable centre de profit qui apporte un réel plus à l’établissement en termes commercial.
Si le défi majeur du Strato était de fidéliser sa clientèle en lui offrant une expérience inoubliable, la maison a sans aucun doute gagné son pari. Un accord parfait entre bien-être, gastronomie et service hôtelier de grande qualité, une alliance réussie entre service haut de gamme et accueil chaleureux très apprécié par une clientèle internationale exigeante.
Crédit photo Jean-Charles Gesquière
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